Fantasme domestique
Journée internationale de la femme, hier, que je ne célèbre pas beaucoup, d’ailleurs; j’attends toujours la Journée internationale de l’homme, voire la Journée internationale de l’humain. Bon. Alors, hier, réfléchissant à mon statut/état/genre de femme, pensant aussi à ma mère et mes grands-mères, il m’est venu un fantasme. Fantasme dans le sens de « production de l’imagination par laquelle le moi cherche à échapper à l’emprise de la réalité » (merci, p’tit Bob). Ça met en vedette la mère de famille que j’aurais pu être (que je pourrais encore être, en fait… manque juste le père de famille et les kids !), et ça va comme suit :
Il était une fois une grande maison en bois, chaude et ensoleillée, avec aux fenêtres à peine givrées de l’horizon à perte de vue. Deux tout petits enfants font la sieste, les autres vont bientôt revenir de l’école, suivis de près par le mâle de la tribu. Je me frotte les yeux un peu collés du petit dodo partagé avec les minis, et j’entre dans la cuisine, m’étirant et baillant de bien-être, comme un chat heureux. J’ouvre la porte du frigo, qui déborde de bonnes et appétissantes affaires, et je décide du menu du souper. Je mets un bon disque, j’attache mes cheveux et j’enfile mon tablier; disposant sur l’immense et vieille table de bois tout ce dont j’aurai besoin, je m’installe et commence à parer les légumes. J’ai pris soin de ne pas mettre la musique trop forte, ce qui me permet de tendre l’oreille… pour bientôt distinguer, venant du bas de la côte, le bruit familier de l’autobus scolaire : v’là une bonne partie de ma gang qui arrive ! J’accueille leurs cris, leurs vêtements pleins de neige et leurs rires avec un sentiment mêlé de joie, de fierté et d’impatience indulgente de mère de famille nombreuse. Les deux petits s’éveillent, on va les chercher et tout ce beau p’tit monde s’installe quelque part dans la grande cuisine, l’un à ses devoirs, l’autre à sa lecture obligatoire, un autre encore qui m’aide avec les carottes à éplucher, les bébés avec leurs bébelles. Enfin, le bonhomme de mon cœur arrive aussi, se secoue et s’ébroue, se colletaille avec la marmaille, et me serre dans ses bras en m’embrassant comme s’il ne m’avait pas vue depuis six mois. Puis il relève ses manches et se pose en mode disponibilité : un jouet égaré ici, une suce tombée dans les poils de chien là, un coup de main en vocabulaire, un poêle à bois à nourrir. Nous nous zieutons souvent, fascinés par la force de l’image, amusés des cernes mauves sous nos yeux, épuisés des cris incessants, intensément heureux d’être là. Le sourire que nous échangeons à cet instant précis nous confirme que cette folle et fabuleuse famille est la nôtre, et que pour rien au monde nous ne donnerions notre place.
Il était une fois une grande maison en bois, chaude et ensoleillée, avec aux fenêtres à peine givrées de l’horizon à perte de vue. Deux tout petits enfants font la sieste, les autres vont bientôt revenir de l’école, suivis de près par le mâle de la tribu. Je me frotte les yeux un peu collés du petit dodo partagé avec les minis, et j’entre dans la cuisine, m’étirant et baillant de bien-être, comme un chat heureux. J’ouvre la porte du frigo, qui déborde de bonnes et appétissantes affaires, et je décide du menu du souper. Je mets un bon disque, j’attache mes cheveux et j’enfile mon tablier; disposant sur l’immense et vieille table de bois tout ce dont j’aurai besoin, je m’installe et commence à parer les légumes. J’ai pris soin de ne pas mettre la musique trop forte, ce qui me permet de tendre l’oreille… pour bientôt distinguer, venant du bas de la côte, le bruit familier de l’autobus scolaire : v’là une bonne partie de ma gang qui arrive ! J’accueille leurs cris, leurs vêtements pleins de neige et leurs rires avec un sentiment mêlé de joie, de fierté et d’impatience indulgente de mère de famille nombreuse. Les deux petits s’éveillent, on va les chercher et tout ce beau p’tit monde s’installe quelque part dans la grande cuisine, l’un à ses devoirs, l’autre à sa lecture obligatoire, un autre encore qui m’aide avec les carottes à éplucher, les bébés avec leurs bébelles. Enfin, le bonhomme de mon cœur arrive aussi, se secoue et s’ébroue, se colletaille avec la marmaille, et me serre dans ses bras en m’embrassant comme s’il ne m’avait pas vue depuis six mois. Puis il relève ses manches et se pose en mode disponibilité : un jouet égaré ici, une suce tombée dans les poils de chien là, un coup de main en vocabulaire, un poêle à bois à nourrir. Nous nous zieutons souvent, fascinés par la force de l’image, amusés des cernes mauves sous nos yeux, épuisés des cris incessants, intensément heureux d’être là. Le sourire que nous échangeons à cet instant précis nous confirme que cette folle et fabuleuse famille est la nôtre, et que pour rien au monde nous ne donnerions notre place.